Le paradoxe des industries critiques : hyper-régulées mais sous-communicantes

En matière de communication, certains secteurs sont considérés comme critiques. On y investit des millions dans la sécurité et la conformité, mais on oublie souvent de sécuriser la circulation de l’information. Les entreprises évoluant dans la  finance, le transport, la santé, ou encore l’énergie consacrent chaque année des sommes considérables à leurs infrastructures et procédures, mais négligent souvent leurs dispositifs de communication interne, sous-estimant l’impact sur leur fonctionnement.

En 2019, le rapport State of the Sector indiquait que, dans les entreprises de plus de 10 000 employés, le budget mensuel par salarié consacré à la communication interne s’élevait à moins de 1 euro. Si ce chiffre a évolué aujourd’hui, notamment avec la digitalisation des outils, la communication interne reste souvent mise de côté par les entreprises.

Cette tendance perdure : l’Observatoire de l’Intranet Augmenté 2025 révèle encore que 22 % des entreprises n’ont mis en place aucun pilotage de leur intranet, témoignant d’un manque persistant de priorité stratégique. Par ailleurs, la satisfaction moyenne des utilisateurs vis-à-vis de leur intranet reste modeste en 2025 (avec une moyenne à 6,8/10).

 

Les 4 freins qui paralysent la communication interne dans les secteurs régulés

La communication interne est souvent négligée au profit d’autres préoccupations. Peur, prudence excessive, ou encore rigidité organisationnelle sont des facteurs pouvant entraver son bon fonctionnement. Pourtant, ces obstacles peuvent s’avérer plus coûteux qu’il n’y paraît.

D’autres priorités jugées plus critiques

Lors de la hiérarchisation des investissements, la communication interne est souvent reléguée au second plan. On considère, à tort, que son importance est limitée. Lorsque les budgets sont alloués, les décideurs se focalisent plutôt sur le développement technologique, la sécurité, ou encore la communication externe et la publicité.

Pourtant, le coût d’une mauvaise communication interne peut excéder celui d’un incident lié à un problème de sécurité. Dans un hôpital par exemple, une information mal transmise peut entraîner une erreur de dosage médicamenteux, et mettre la vie d’un patient en danger.

La peur du risque de conformité

« Et si on dit quelque chose qu’il ne faut pas ? ». Dans les secteurs régulés, la prudence excessive peut freiner la communication interne. Les équipes hésitent à diffuser des informations de peur de dire quelque chose d’inapproprié ou non conforme.

Cette inaction peut avoir l’effet inverse : rumeurs, spéculations et perte de confiance se développent rapidement, fragilisant la motivation et l’engagement des collaborateurs.

La clé est de trouver le juste équilibre entre sécurité et fluidité de l’information, en mettant en place des processus clairs et des outils sécurisés qui permettent de communiquer sans craindre les sanctions.

Dans un laboratoire, les équipes peuvent limiter le partage d’informations quant à l’avancée de leurs recherches par peur de la non-conformité. Cela peut ralentir la collaboration entre les chercheurs et les responsables conformité, et la mise sur le marché d’un nouveau traitement.

Les silos organisationnels renforcés

Dans les secteurs critiques, la hiérarchie est souvent rigide et verticale. La circulation de l’information est presque exclusivement descendante, avec une déperdition à chaque niveau.

Cela signifie que ce sont les dirigeants, cadres et managers qui communiquent aux collaborateurs, mais rarement l’inverse. Ces derniers peuvent alors ressentir un manque de considération et la sensation d’être mis à l’écart. Ils risquent d’être démotivés, et à terme de quitter l’entreprise.

Prenons l’exemple d’une usine, dans laquelle les ouvriers signalent à plusieurs reprises la survenue d’un problème, sans que l’information ne remonte dans la hiérarchie. Une panne peut se produire, alors qu’elle aurait pu être évitée avec une meilleure communication.

La technologie perçue comme un risque

« Nos systèmes sont sécurisés, n’y touchons pas ». La crainte de mettre en péril la sécurité des systèmes entrave l’adoption de nouvelles technologies collaboratives, en particulier dans les industries sensibles. Cela est dû à la conviction qu’une nouvelle technologie entraîne nécessairement un risque pour la structure.

Cette stratégie peut être protectrice à court ou moyen terme, mais aura des conséquences néfastes à long terme. L’entreprise ne pourra en effet pas suivre les évolutions du marché, notamment en termes de productivité ou d’innovation.

De plus, l’adoption de nouveaux outils et le maintien du niveau de sécurité ne sont pas incompatibles. Les produits actuels intègrent des protocoles de sécurité avancés, tels que le chiffrement de bout en bout, ou encore l’authentification à plusieurs facteurs.

La direction d’une entreprise peut par exemple refuser toute installation d’outils de communication modernes. Les échanges se limitent alors aux mails, limitant la réactivité des employés et leur collaboration.

Workbook : Build Internal Comms Plan 1

Les conséquences cachées : quand le silence coûte plus cher que la parole

L’absence d’investissement dans la communication interne, ou un investissement trop limité, peuvent avoir plusieurs conséquences : 

  • Impact sur la sécurité : la communication interne remplit une fonction opérationnelle. Elle permet de diffuser les procédures et les règles internes à suivre, notamment celles relatives aux consignes de sécurité. Si elle n’est pas assez efficace, les employés ne savent pas comment réaliser leurs tâches de façon optimale, ce qui peut conduire à de nombreux incidents.

Exemple : une usine vient d’acheter un nouvel outil de production. Pour l’utiliser, il faut porter un équipement spécifique, sous peine de brûlure. Il est donc très important que la consigne soit diffusée à toutes les équipes de production.

 

  • Impact financier : lorsque les informations ne circulent pas bien, les salariés peinent à comprendre leurs objectifs et à déterminer les fonctions de chacun. Ils se désengagent peu à peu, ce qui conduit à une baisse de productivité et peut favoriser les erreurs. De plus, la sensation de ne pas être écouté et informé peut conduire à une hausse du turnover.  Une étude de Mitel précise qu’une communication et une collaboration inefficaces font perdre 9000 € par an et par salarié aux entreprises françaises.

Exemple : une banque employant de nombreux commerciaux n’a pas suffisamment bien défini le périmètre d’activité de chacun. Ils ne savent pas quels clients ils doivent accompagner, se démotivent peu à peu et finissent par quitter la société.

 

  • Impact réglementaire : Dans des secteurs très réglementés, tels que la banque et l’assurance, la mise en conformité dépend majoritairement de la faculté des équipes à appliquer des procédures précises, qui évoluent au gré des réglementations. Or, l’application de ces procédures nécessite qu’elles soient bien comprises et diffusées à l’ensemble des collaborateurs concernés. Un défaut de communication peut alors entraîner une mauvaise application des règles, et des sanctions financières de la part des organes de régulation (Autorité des Marchés Financiers, par exemple).

Exemple : une compagnie d’assurance a mis en place de nouveaux contrôles destinés à lutter contre le blanchiment d’argent. Si tous les collaborateurs concernés par ces contrôles ne sont pas informés, certains ne seront pas réalisés, ce qui exposera l’entreprise à une sanction de la part du régulateur.

 

  • Cas concrets : Une défaillance de communication peut engendrer divers types d’incidents :

– Erreur de production si une fiche technique n’est pas partagée.

– Blessure physique en cas de non-respect des consignes de sécurité.

– Pannes informatiques lorsqu’un nouvel outil est déployé sans que les utilisateurs n’en soient informés.

– Erreur de facturation due à un manque de coordination entre l’équipe commerciale et l’équipe comptable.

 

Les pionniers qui transforment leur communication (et leurs résultats)

Sopra Steria

Sopra Steria, entreprise française et acteur majeur de la Tech, a mis en place :

  • Une plateforme de collaboration pour explorer les valeurs du groupe.
  • Des espaces communautaires.
  • Une stratégie de contenu.

Pour cela, elle a notamment utilisé un intranet spécialisé et adapté à ses usages, un moteur de recherche optimisé et des contenus personnalisés.

Les résultats ont rapidement été visibles :

  • L’intranet a été adopté par 87 % des employés.
  • Le taux de participation aux évènements communautaires a augmenté.
  • L’expérience employé est devenue plus cohérente, d’un point de vue global et local.

 

CrossFirst Bank

Un acteur du secteur bancaire, CrossFirst Bank,  a quant à lui utilisé la communication interne pour accompagner sa transformation digitale et améliorer l’intégration des nouveaux salariés.

Cet établissement a mis en place :

  • Un parcours digital dans l’intranet pour aider les employés à s’approprier les nouveaux outils.
  • Des contenus digitaux publiés dans un intranet dédié.
  • Des réunions d’équipe qui s’accompagnent de kits de communication prêts à l’emploi.

Les résultats observés sont les suivants :

  • L’intranet a été adopté à plus de 90 % dès la première semaine.
  • L’onboarding des nouveaux salariés est optimisé et aligné avec la culture de l’entreprise.
  • Les nouveaux produits sont mieux compris par les équipes.

 

logo entreprise Toulouse métropole

Toulouse Métropole

Toulouse Métropole, collectivité territoriale de la région Occitanie, a mis en place :

  • Un nouveau projet de modernisation de son intranet, afin de remplacer son ancien portail devenu obsolète et instable
  • Une amélioration de l’expérience utilisateur, avec une attention particulière portée au mobile et aux formats de contenus modernes
  • Une réorganisation logique et ergonomique des contenus
  • Une contribution facilitée pour les différents services, sans nécessité de développement spécifique

Les résultats ont rapidement été visibles :

  • +400 % de visiteurs uniques par mois sur l’intranet.
  • Un espace RH particulièrement dynamique avec 7 900 visiteurs uniques par mois.
  • 130 contributeurs actifs dans les directions (contre 80 sur l’ancien intranet).
  • 2 heures suffisent désormais pour former un contributeur, contre 1,5 jour auparavant.

« 94 % des entreprises considèrent l’intranet comme indispensable ou nécessaire dans leur environnement de travail. »

— Source : Arctus, 2025

La méthode en 5 étapes pour débloquer votre communication interne

Pour débloquer la communication interne, il faut suivre 5 étapes.

Étape 1 : Auditer les coûts du silence

Identifiez les situations où une communication insuffisante a généré des retards, des incidents ou une perte de productivité. Chiffrez ces coûts pour établir un lien clair entre manque d’information et impact sur l’entreprise.

Étape 2 : Cartographier les flux critiques

Repérez les informations essentielles et leurs destinataires, ainsi que les canaux et le moment de diffusion. Trop d’informations ou une diffusion mal ciblée peut être aussi néfaste qu’un manque de communication.

Étape 3 : Sécuriser d’abord, communiquer ensuite

Choisissez des outils adaptés et sécurisés, conformes aux réglementations (RGPD, etc.) et aux besoins de vos équipes. Dans une digital workplace sécurisée, l’intranet collaboratif conforme est prépondérant : il facilite les échanges et renforce le sentiment d’appartenance.

L’outil doit également être adapté à la structure. Par exemple, un tableau d’informations présent dans l’entreprise sera pertinent pour les collaborateurs sur site, mais pas pour ceux en télétravail.

Un bon outil de communication interne doit permettre :

  • De faciliter les interactions entre les collaborateurs ;
  • D’automatiser le plan et les process de communication ;
  • De transmettre l’information à l’ensemble des employés ;
  • De renforcer le sentiment d’appartenance à l’entreprise.

Cela vaut pour les outils digitaux (réseau social d’entreprise, intranet, newsletter, etc.) et les outils physiques (journal interne papier, tableau d’affichage, boîte à idées, etc.).

Étape 4 : Commencer petit, mesurer beaucoup

Lancez un projet pilote sur un service ou une direction. Mesurez la valeur créée à l’aide d’indicateurs de communication (taux d’ouverture, clics, vues) et de conformité (incidents évités, traçabilité des informations critiques).

Pour obtenir une preuve de valeur, vous pourrez suivre :

  • Les indicateurs de communication : taux d’ouverture d’une newsletter, taux de clics sur l’intranet, nombre de vues d’une vidéo, etc.
  • Les indicateurs de conformité : incidents évités, traçabilité des informations critiques, absence de fuites de données internes, etc.

Étape 5 : Transformer la culture, pas seulement les outils

La réussite passe par un changement culturel. Formez les équipes à l’utilisation des nouveaux outils et accompagnez les managers pour qu’ils deviennent des relais actifs de communication ascendante et transversale. La communication interne doit devenir un vrai levier de performance dans l’entreprise.

La mise en place d’un nouvel outil ne peut porter ses fruits que si elle s’accompagne d’une évolution de la culture d’entreprise :

  • Les équipes doivent être formées à l’utilisation de nouvel outil.
  • Les managers doivent notamment être accompagnés pour devenir de vrais relais de communication, et des acteurs de la communication ascendante (des collaborateurs vers la direction).
  • Ce type de communication, ainsi que la communication transversale, doit être encouragé.

Dans les secteurs régulés, l’accompagnement est encore plus important : la communication interne doit être perçue comme un vrai levier de performance.

 

Et vous, combien vous coûte actuellement le silence dans votre organisation ?

La communication interne ne se limite pas à une simple diffusion passive d’informations. Dans les secteurs critiques, où les erreurs peuvent coûter cher, elle revêt même une importance cruciale. Responsables communication, vous ne diffusez pas, vous pilotez un élément clé de la réussite de votre entreprise ! Dans ces secteurs, la communication interne ne représente pas un coût supplémentaire, mais un investissement dans la réussite de l’entreprise, sa sécurité, et la confiance des salariés.