Un enjeu propre aux organisations multisites et réglementées

Dans les banques et assurances, la réalité organisationnelle est souvent la même : des équipes éclatées sur tout le territoire, des structures régionales avec leurs spécificités locales, des agences parfois très petites… et des fonctions RH/Communication de plus en plus centralisées.

La DSI, elle, se situe à la croisée de ces mondes : entre les équipes locales, les outils groupe, les contraintes de sécurité et les exigences réglementaires. C’est ce que décrit Nicolas Salendres, aujourd’hui au sein d’une équipe dédiée data & IA chez Groupama Auvergne Rhône-Alpes :

« Je viens des RH : j’ai piloté le contrôle de gestion sociale, puis une équipe paie et pilotage RH. Aujourd’hui, je suis dans une cellule Data & IA, aux côtés de spécialistes de la donnée. Ce passage de la DRH vers la data n’est pas anodin : notre DRH, également directeur des ressources informatiques, a souhaité que le pilotage des données RH quitte la DRH pour rejoindre cette cellule. Cela dit quelque chose de l’évolution du métier. »

Ce mouvement illustre un enjeu clé : la donnée et les outils RH/Com ne peuvent plus être pensés sans la DSI, et la DSI ne peut plus décider seule des architectures de collaboration internes.

De la donnée RH “boîte noire” au pilotage stratégique

Pendant longtemps, la donnée RH est restée sous-utilisée :

  • fragmentée dans des logiciels différents (paie, formation, temps, entretiens, etc.),
  • réservée à quelques spécialistes,
  • rarement croisée avec les données business.

« Traditionnellement, la donnée RH est une boîte noire, réservée à la DRH, explique Nicolas Salendres. Elle n’est pas croisée avec les données business ou d’efficacité opérationnelle. Pourtant, c’est une mine d’or pour comprendre – par exemple – les phénomènes de turnover, les difficultés de recrutement ou les signaux faibles sociaux. Mais pour bien l’utiliser, on a besoin d’avoir une vision unifiée de ces données. »

Avec l’augmentation des démissions, les tensions sur les compétences clés, et l’arrivée de nouvelles obligations (RSE, transparence de la rémunération…), cette donnée devient centrale :

« Nous avons découvert brutalement que nous manquions d’axes d’analyse pour expliquer certaines vagues de départs. En parallèle, les contraintes réglementaires nous demandent de fournir des données de plus en plus fines. La directive sur la transparence des rémunérations, par exemple, va mettre en lumière l’obsolescence de certaines cartographies d’emploi ou encore des manques en termes de pilotage des revalorisations individuelles. Il faudra être capable de les expliquer. Peu d’entreprises sont prêtes. »

D’où l’importance de rapprocher DSI et RH pour :

  • unifier la donnée RH dans une base unique,
  • la croiser avec les données d’activité,
  • passer d’un suivi administratif à un pilotage stratégique (engagement, mobilité, inclusion, rémunération, etc.).

Créer des interfaces entre métiers et DSI : le rôle des “traducteurs”

Reste un frein bien connu : RH et DSI ne parlent pas la même langue. Les métiers RH/Com pensent “climat social, expérience collaborateur, culture managériale”. Les DSI pensent “architecture, sécurité, interfaçage”.

« J’ai des réunions où je ne comprends simplement pas ce que l’on me raconte, sourit Nicolas Salendres. Et parfois, c’est parce que je ne pose pas la bonne question. C’est là que les chefs de projet, business analysts ou product owners jouent un rôle d’interprète entre les équipes métier et les équipes informatiques. Des progrès considérables ont été réalisés pour instaurer un dialogue constant et empathique pour écouter « la voix du client . »

Chez Zenika, cette interface fonctionne particulièrement bien grâce à la proximité entre Héloïse Lutton, DRH internationale, et Pierre Nicoli, DSI.

« Dès mon arrivée, nous avons travaillé ensemble, raconte Héloïse. Pierre nous accompagne beaucoup : il nous aide à convaincre en interne que ce sont les bons outils, à expliciter les enjeux techniques, et à sécuriser les choix. Car il faut le dire : certaines organisations considèrent encore la RH comme “la dernière roue du carrosse”. Avoir une DSI qui comprend réellement les besoins métier change complètement la donne ».

« Respecter l’expertise de l’autre, cela semble basique, mais ce n’est pas si fréquent, ajoute Pierre Nicoli. Je ne me substitue pas à la DRH sur les aspects droit du travail ou climat social. En revanche, je garantis que les outils que nous introduisons ne nuisent pas au SI global, qu’ils sont sécurisés, et je prends en charge le dialogue technique avec les éditeurs. »

Le résultat ?
Des projets SIRH, data ou intranet co-construits, où chacun joue pleinement son rôle :

  • la DSI sécurise, intègre et fait dialoguer les systèmes,
  • la DRH et la Com définissent l’expérience souhaitée pour les collaborateurs et les managers,
  • les équipes terrain sont impliquées via des feedbacks structurés.

Sécuriser et fluidifier l’expérience collaborateur

La sécurité reste une préoccupation majeure des DSI, en particulier dans les groupes bancaires et assurantiels. Pourtant, cela ne doit pas se faire au détriment de l’expérience collaborateur.

Par exemple, le bilan social individuel (BSI), accessible via une plateforme externe, est totalement intégré dans l’environnement Groupama :

« Le collaborateur croit se connecter sur l’intranet Groupama, mais il est redirigé vers l’outil de l’éditeur, de façon transparente. Derrière, un dossier d’architecture technique a été monté avec la DSI pour sécuriser les flux et les accès. »

Dans ces projets, la DSI n’est pas juste un “passage obligé” pour des validations techniques. Elle devient un partenaire de la DRH pour :

  • fluidifier les parcours (moins de mails, moins de doublons, des interfaces claires),
  • garantir la cohérence des points de contact (intranet, SIRH, BSI, etc.),
  • sécuriser les données sensibles des collaborateurs.

Intranet et Digital Workplace : un terrain de jeu commun

Au cœur de cette collaboration, l’intranet – ou plus largement la Digital Workplace – joue un rôle de pivot.

Bien conçu, il devient :

  • le hub central des ressources RH (processus, droits, actualités sociales, campagne annuelle),
  • le canal privilégié de la Communication interne (messages stratégiques, valorisation des réussites, explication des transformations),
  • le point d’entrée vers d’autres briques du SI (self care, BSI, outils métiers, formulaires, FAQ, etc.).

Pour que ce hub fonctionne, DSI, RH et Com doivent travailler main dans la main :

  • côté DSI : architecture, sécurité, intégrations, gouvernance des accès ;
  • côté RH/Com : éditorialisation, animation, réponses aux besoins concrets des collaborateurs (terrain comme siège) ;
  • côté management : relais de proximité, incitation à l’usage, remontée de feedback sur ce qui manque ou dysfonctionne.

Dans ce contexte, un éditeur d’intranet comme Powell fournit le socle technologique. Mais la réussite du projet dépend d’abord de la qualité du dialogue entre DSI et métiers.

3 pistes pour renforcer le binôme DSI–Com/RH

Au fil des témoignages, plusieurs leviers ressortent pour transformer la DSI en véritable alliée stratégique des RH et de la Communication interne. Avec un point commun : la relation repose avant tout sur la compréhension mutuelle et la capacité à traduire les enjeux de l’autre.

1. Créer des espaces de dialogue réguliers (et sincères)

Comités de pilotage, rituels managériaux, ateliers de cadrage, bilatérales RH–DSI… l’enjeu n’est pas simplement de se parler, mais de se comprendre, et surtout de se tenir au courant des contextes respectifs.

C’est un élément clé chez Zenika, comme le raconte Héloïse :

« Nos rôles évoluent en permanence, donc nous devons avoir des discussions régulières pour bien nous expliquer nos contextes, pourquoi nous demandons certaines choses et quels sont nos enjeux. »

Même conviction côté DSI :

« La performance ne vient pas seulement du fait d’avancer, souligne Pierre Nicoli. Elle émane aussi de la capacité à s’arrêter pour se parler, à lever la tête du guidon et à vérifier si nous allons dans la bonne direction. »

Dans certaines organisations, ces espaces de dialogue prennent la forme de COPIL formels. Dans d’autres, ce sont des déjeuners, des points informels, ou des temps dédiés à la relecture des besoins. L’important n’est pas le format : c’est la régularité, et l’attention portée aux enjeux de l’autre.

2. Miser sur les “profils ponts” : ceux qui comprennent (vraiment) les deux mondes

Chefs de projet, business analysts, product owners, ex-RH passés côté data comme Nicolas Salendres, DSI ayant déjà été représentants du personnel comme Pierre Nicoli… Ces profils jouent un rôle irremplaçable : ils traduisent.

« Et comme nous avons chacun des parcours croisés – conseil RH pour moi, conseil tech pour Pierre –, nous avons cette capacité à reformuler, vulgariser, et rendre accessible le jargon de nos univers respectifs », explique Héloïse Lutton.

Ces profils ponts permettent :

  • d’exprimer les besoins RH/Com en termes compréhensibles par la DSI,
  • d’expliquer les contraintes techniques au métier sans les noyer dans les acronymes,
  • d’identifier des opportunités “bonus” dans les projets : automatisation d’une tâche, meilleure traçabilité, connexion entre deux outils, ou simplification d’un process.

Chez Zenika, ce fonctionnement permet par exemple de dépasser le strict périmètre d’un SIRH :

« Une fois l’outil correctement intégré, on peut aller plus loin : alléger des tâches manuelles, guider des opérations, connecter les systèmes. C’est quand on s’intéresse au travail de l’autre qu’on détecte cette valeur ajoutée secondaire », explique Pierre Nicoli.

3. Partir d’un principe simple : l’autre ne nous veut pas du mal

Sur des sujets sensibles – gestion de la donnée, RGPD, sécurité, représentativité des collaborateurs, risques contentieux, télétravail, transparence… – les tensions peuvent vite émerger si chacun reste dans sa tour.

Pour Pierre Nicoli, la clé tient en une phrase :

« Nous gagnons à partir d’une valeur fondamentale : en général, l’autre ne nous veut pas du mal. À partir de là, on peut se parler, se faire du feedback, accepter nos angles morts et reconnaître que nos expertises se complètent. »

Héloïse renchérit :

« Ce qui est aidant pour nous ne l’est pas forcément pour la DSI, et inversement. Si nous ne prenons pas le temps d’expliquer notre contexte et nos contraintes, cela ne peut pas fonctionner. Chacun doit faire l’effort. »

Concrètement, cela implique :

Pour les DSI :

  • vulgariser les enjeux techniques,
  • éviter de “sur-construire” quand une solution simple suffit,
  • être à l’écoute du besoin métier, même lorsque celui-ci est mal formulé,
  • accepter que l’expérience collaborateur est un enjeu stratégique — pas uniquement fonctionnel.

Pour les RH/Com :

  • clarifier les besoins sans se perdre dans les cas particuliers,
  • intégrer la DSI dès le début des projets (et pas au moment de la mise en production),
  • accepter les contraintes d’architecture, de sécurité, d’interfaçage,
  • partager les signaux faibles du terrain pour anticiper les risques (sociaux, juridiques, organisationnels).

En somme : sortir de la logique de “demandeur/exécutant” pour entrer dans une logique de partenariat où l’on se parle, où l’on se comprend, et où chaque direction enrichit le travail de l’autre.

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